Jean Dupuy

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Après un bref passage à la section architecture de l’Ecole des Beaux-arts de Paris, il se consacre à la peinture, pratiquant une abstraction gestuelle proche des œuvres de Georges Mathieu et de Jean Degottex. Il jette néanmoins la plus grande partie de sa production picturale (issue de l'Abstraction lyrique) dans la Seine : une action qu'il commentera plus tard en deux mots : « Plouf ! Ouf ! ». En 1968 (soit un an après son arrivée à New York il réalise sa sculpture <em>Cone Pyramid (Heart Beats Dust)</em>  qui s'impose comme l'œuvre emblématique d'EAT (Experiments in Art and Technology). Cette sculpture de poussière, activée par les pulsations cardiaques des spectateurs, est la première rencontre de Jean Dupuy avec l'idée même du collectif mais aussi avec ce qu'il nomme le Lazy Art : l'art paresseux, un art qui consisterait, nous dit-il, à « faire travailler les autres, en grande partie, à sa place". Il avoue d'ailleurs volontiers la grande part de hasard induite dans son travail. _ <strong>Œuvres exposées:</strong> <strong>Lazy Susan</strong>, 1979 bois, acier, 390 x 210 x 40 cm courtesy l'artiste, collection Frac Bourgogne <em>"J’avais, en 1974, construit pour faire une performance, une petite scène en bois, circulaire, de 80 cm de diamètre. Elle était fixée à une planche de 150 cm de long. Cette scène, montée sur un système de roulement à billes qu’on appelle en américain «lazy susan», était rotative. Pour en faire une sculpture, je l’ai suspendue à deux échelles qui avaient servi à faire des performances sur une tour à P.S.One et que j’ai fixé l’une contre l’autre, en haut, ce qui a formé un ensemble inscrit dans un grand triangle. Il touchait presque le plafond, à 3,50 mètres. J’ai ensuite bloqué la roue, encore mobile. Ainsi la scène rotative perdait sa fonction."</em> On ne peut plus la faire tourner, mais comme l’explique un texte anagrammatique rédigé par l’artiste, Lazy Suzan tourne encore puisqu’elle suit “paresseusement” la rotation de la terre. Ainsi Lazy Suzan est une œuvre qui signale la parenté d’esprit de Jean Dupuy avec George Maciunas, Jackson Mac Low, George Brecht, Robert Filliou... <strong>Lazy Susan</strong> (toiles),1984-1993 acryliques sur toile, 90 x 77 cm, 147 x 124 cm courtesy l'artiste, collection Frac Bourgogne <em>"C'est avec ces quatre mots « American venus unique red » inscrits sur un crayon de marque « venus », que j’ai fait une anagramme pour la première fois, à New York, un jour de désœuvrement de 1973. Les 22 lettres d’ « american venus unique red » m’ont donné « univers ardu en mécanique ». En 1979, j’ai inventé un système d’écriture, basé sur un choix de mots qui représentaient des couleurs, pour résoudre des équations de lettres : des anagrammes. Ainsi je revenais à la couleur, après avoir arrêté de peindre en 1966. Je constituais de grandes anagrammes, avec d’ un côté une liste exclusivement composée de noms de couleurs, et de l’autre le récit d’une histoire, ou la description d’un objet. Chacun des deux textes étant rigoureusement composé avec les mêmes lettres que l’autre, ni plus ni moins. Un face à face anagrammatique dont une moitié (la palette) colorait l’autre. Ces équations, résolues empiriquement, me prenaient un temps considérable. Elles m’obligeaient à coiffer les textes de la partie basse de titres souvent abscons. D’autant plus que certaines équations dépassaient le millier de lettres. J’ai alors eu l’idée de remplacer les titres par les notes de la gamme musicale, que j’ai disposées à la fin de chaque texte. Je gagnais à la fois beaucoup de temps, et de liberté dans la rédaction. D’autre part je pouvais, parfois, interpréter, sous forme d’homophonies, les notes musicales (mi mi si la ré : mimi scie la raie, musique cruelle). Puis, pour aller encore plus vite, sous le nom d’emprunt de « Léon bègue » j’ai écrit comme un bègue parle, en doublant, triplant (et plus) les syllabes. C’est à la fin des années 90, finalement, que j’ai trouvé le dernier procédé, c’est-à-dire une simple mise en page : en plaçant les mots de couleurs et les notes musicales de part et d’autre (en haut et en bas) de l’équation de lettres. Je ne vois pas, aujourd’hui, comment je pourrais aller plus vite pour résoudre de telles anagrammes. Par contre, reste pour chaque texte, à trouver le ton pour exprimer ce que je veux dire, ce qui échappe, certes, à toute méthode."</em> Jean Dupuy, 2006 &nbsp;
Jean Dupuy Né le 22 novembre 1925 à Moulins, France Vit et travaille à Nice, France Représenté par la galerie Loevenbruck, Paris www.loevenbruck.com Jean Dupuy naît en 1925 en Auvergne. Après un bref passage à la section architecture de l’Ecole des Beaux-arts de Paris, il se consacre à la peinture, pratiquant une abstraction gestuelle proche des œuvres de Georges Mathieu et de Jean Degottex. Il jette néanmoins la plus grande partie de sa production picturale (issue de l'Abstraction lyrique) dans la Seine : une action qu'il commentera plus tard en deux mots : « Plouf ! Ouf ! ». En 1968 (soit un an après son arrivée à New York il réalise sa sculpture Cone Pyramid (Heart Beats Dust)  qui s'impose comme l'œuvre emblématique d'EAT (Experiments in Art and Technology). Cette sculpture de poussière, activée par les pulsations cardiaques des spectateurs, est la première rencontre de Jean Dupuy avec l'idée même du collectif mais aussi avec ce qu'il nomme le Lazy Art : l'art paresseux, un art qui consisterait, nous dit-il, à « faire travailler les autres, en grande partie, à sa place". Il avoue d'ailleurs volontiers la grande part de hasard induite dans son travail. _ Œuvres exposées: Lazy Susan, 1979 bois, acier, 390 x 210 x 40 cm courtesy l'artiste, collection Frac Bourgogne "J’avais, en 1974, construit pour faire une performance, une petite scène en bois, circulaire, de 80 cm de diamètre. Elle était fixée à une planche de 150 cm de long. Cette scène, montée sur un système de roulement à billes qu’on appelle en américain «lazy susan», était rotative. Pour en faire une sculpture, je l’ai suspendue à deux échelles qui avaient servi à faire des performances sur une tour à P.S.One et que j’ai fixé l’une contre l’autre, en haut, ce qui a formé un ensemble inscrit dans un grand triangle. Il touchait presque le plafond, à 3,50 mètres. J’ai ensuite bloqué la roue, encore mobile. Ainsi la scène rotative perdait sa fonction." On ne peut plus la faire tourner, mais comme l’explique un texte anagrammatique rédigé par l’artiste, Lazy Suzan tourne encore puisqu’elle suit “paresseusement” la rotation de la terre. Ainsi Lazy Suzan est une œuvre qui signale la parenté d’esprit de Jean Dupuy avec George Maciunas, Jackson Mac Low, George Brecht, Robert Filliou... Lazy Susan (toiles),1984-1993 acryliques sur toile, 90 x 77 cm, 147 x 124 cm courtesy l'artiste, collection Frac Bourgogne "C'est avec ces quatre mots « American venus unique red » inscrits sur un crayon de marque « venus », que j’ai fait une anagramme pour la première fois, à New York, un jour de désœuvrement de 1973. Les 22 lettres d’ « american venus unique red » m’ont donné « univers ardu en mécanique ». En 1979, j’ai inventé un système d’écriture, basé sur un choix de mots qui représentaient des couleurs, pour résoudre des équations de lettres : des anagrammes. Ainsi je revenais à la couleur, après avoir arrêté de peindre en 1966. Je constituais de grandes anagrammes, avec d’ un côté une liste exclusivement composée de noms de couleurs, et de l’autre le récit d’une histoire, ou la description d’un objet. Chacun des deux textes étant rigoureusement composé avec les mêmes lettres que l’autre, ni plus ni moins. Un face à face anagrammatique dont une moitié (la palette) colorait l’autre. Ces équations, résolues empiriquement, me prenaient un temps considérable. Elles m’obligeaient à coiffer les textes de la partie basse de titres souvent abscons. D’autant plus que certaines équations dépassaient le millier de lettres. J’ai alors eu l’idée de remplacer les titres par les notes de la gamme musicale, que j’ai disposées à la fin de chaque texte. Je gagnais à la fois beaucoup de temps, et de liberté dans la rédaction. D’autre part je pouvais, parfois, interpréter, sous forme d’homophonies, les notes musicales (mi mi si la ré : mimi scie la raie, musique cruelle). Puis, pour aller encore plus vite, sous le nom d’emprunt de « Léon bègue » j’ai écrit comme un bègue parle, en doublant, triplant (et plus) les syllabes. C’est à la fin des années 90, finalement, que j’ai trouvé le dernier procédé, c’est-à-dire une simple mise en page : en plaçant les mots de couleurs et les notes musicales de part et d’autre (en haut et en bas) de l’équation de lettres. Je ne vois pas, aujourd’hui, comment je pourrais aller plus vite pour résoudre de telles anagrammes. Par contre, reste pour chaque texte, à trouver le ton pour exprimer ce que je veux dire, ce qui échappe, certes, à toute méthode." Jean Dupuy, 2006  
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Après un bref passage à la section architecture de l’Ecole des Beaux-arts de Paris, il se consacre à la peinture, pratiquant une abstraction gestuelle proche des œuvres de Georges Mathieu et de Jean Degottex. Il jette néanmoins la plus grande partie de sa production picturale (issue de l&rsquo;Abstraction lyrique) dans la Seine : une action qu&rsquo;il commentera plus tard en deux mots : « Plouf ! Ouf ! ».</p> <p>En 1968 (soit un an après son arrivée à New York il réalise sa sculpture <em>Cone Pyramid (Heart Beats Dust)</em>  qui s&rsquo;impose comme l&rsquo;œuvre emblématique d&rsquo;EAT (Experiments in Art and Technology). Cette sculpture de poussière, activée par les pulsations cardiaques des spectateurs, est la première rencontre de Jean Dupuy avec l&rsquo;idée même du collectif mais aussi avec ce qu&rsquo;il nomme le Lazy Art : l&rsquo;art paresseux, un art qui consisterait, nous dit-il, à « faire travailler les autres, en grande partie, à sa place ». 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En 1979, j’ai inventé un système d’écriture, basé sur un choix de mots qui représentaient des couleurs, pour résoudre des équations de lettres : des anagrammes. Ainsi je revenais à la couleur, après avoir arrêté de peindre en 1966. Je constituais de grandes anagrammes, avec d’ un côté une liste exclusivement composée de noms de couleurs, et de l’autre le récit d’une histoire, ou la description d’un objet. Chacun des deux textes étant rigoureusement composé avec les mêmes lettres que l’autre, ni plus ni moins. Un face à face anagrammatique dont une moitié (la palette) colorait l’autre. Ces équations, résolues empiriquement, me prenaient un temps considérable. Elles m’obligeaient à coiffer les textes de la partie basse de titres souvent abscons. D’autant plus que certaines équations dépassaient le millier de lettres. J’ai alors eu l’idée de remplacer les titres par les notes de la gamme musicale, que j’ai disposées à la fin de chaque texte. Je gagnais à la fois beaucoup de temps, et de liberté dans la rédaction. D’autre part je pouvais, parfois, interpréter, sous forme d’homophonies, les notes musicales (mi mi si la ré : mimi scie la raie, musique cruelle). Puis, pour aller encore plus vite, sous le nom d’emprunt de « Léon bègue » j’ai écrit comme un bègue parle, en doublant, triplant (et plus) les syllabes. C’est à la fin des années 90, finalement, que j’ai trouvé le dernier procédé, c’est-à-dire une simple mise en page : en plaçant les mots de couleurs et les notes musicales de part et d’autre (en haut et en bas) de l’équation de lettres. Je ne vois pas, aujourd’hui, comment je pourrais aller plus vite pour résoudre de telles anagrammes. Par contre, reste pour chaque texte, à trouver le ton pour exprimer ce que je veux dire, ce qui échappe, certes, à toute méthode. »</em><br /> Jean Dupuy, 2006</p> <p>&nbsp;</p>

Jean Dupuy

Né le 22 novembre 1925 à Moulins, France
Vit et travaille à Nice, France
Représenté par la galerie Loevenbruck, Paris
www.loevenbruck.com

Jean Dupuy naît en 1925 en Auvergne. Après un bref passage à la section architecture de l’Ecole des Beaux-arts de Paris, il se consacre à la peinture, pratiquant une abstraction gestuelle proche des œuvres de Georges Mathieu et de Jean Degottex. Il jette néanmoins la plus grande partie de sa production picturale (issue de l’Abstraction lyrique) dans la Seine : une action qu’il commentera plus tard en deux mots : « Plouf ! Ouf ! ».

En 1968 (soit un an après son arrivée à New York il réalise sa sculpture Cone Pyramid (Heart Beats Dust)  qui s’impose comme l’œuvre emblématique d’EAT (Experiments in Art and Technology). Cette sculpture de poussière, activée par les pulsations cardiaques des spectateurs, est la première rencontre de Jean Dupuy avec l’idée même du collectif mais aussi avec ce qu’il nomme le Lazy Art : l’art paresseux, un art qui consisterait, nous dit-il, à « faire travailler les autres, en grande partie, à sa place ». Il avoue d’ailleurs volontiers la grande part de hasard induite dans son travail.

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Œuvres exposées:

Lazy Susan, 1979
bois, acier, 390 x 210 x 40 cm
courtesy l’artiste, collection Frac Bourgogne

« J’avais, en 1974, construit pour faire une performance, une petite scène en bois, circulaire, de 80 cm de diamètre. Elle était fixée à une planche de 150 cm de long. Cette scène, montée sur un système de roulement à billes qu’on appelle en américain «lazy susan», était rotative. Pour en faire une sculpture, je l’ai suspendue à deux échelles qui avaient servi à faire des performances sur une tour à P.S.One et que j’ai fixé l’une contre l’autre, en haut, ce qui a formé un ensemble inscrit dans un grand triangle. Il touchait presque le plafond, à 3,50 mètres. J’ai ensuite bloqué la roue, encore mobile. Ainsi la scène rotative perdait sa fonction. »
On ne peut plus la faire tourner, mais comme l’explique un texte anagrammatique rédigé par l’artiste, Lazy Suzan tourne encore puisqu’elle suit “paresseusement” la rotation de la terre. Ainsi Lazy Suzan est une œuvre qui signale la parenté d’esprit de Jean Dupuy avec George Maciunas, Jackson Mac Low, George Brecht, Robert Filliou…
Lazy Susan (toiles),1984-1993
acryliques sur toile, 90 x 77 cm, 147 x 124 cm
courtesy l’artiste, collection Frac Bourgogne

« C’est avec ces quatre mots « American venus unique red » inscrits sur un crayon de marque « venus », que j’ai fait une anagramme pour la première fois, à New York, un jour de désœuvrement de 1973. Les 22 lettres d’ « american venus unique red » m’ont donné « univers ardu en mécanique ». En 1979, j’ai inventé un système d’écriture, basé sur un choix de mots qui représentaient des couleurs, pour résoudre des équations de lettres : des anagrammes. Ainsi je revenais à la couleur, après avoir arrêté de peindre en 1966. Je constituais de grandes anagrammes, avec d’ un côté une liste exclusivement composée de noms de couleurs, et de l’autre le récit d’une histoire, ou la description d’un objet. Chacun des deux textes étant rigoureusement composé avec les mêmes lettres que l’autre, ni plus ni moins. Un face à face anagrammatique dont une moitié (la palette) colorait l’autre. Ces équations, résolues empiriquement, me prenaient un temps considérable. Elles m’obligeaient à coiffer les textes de la partie basse de titres souvent abscons. D’autant plus que certaines équations dépassaient le millier de lettres. J’ai alors eu l’idée de remplacer les titres par les notes de la gamme musicale, que j’ai disposées à la fin de chaque texte. Je gagnais à la fois beaucoup de temps, et de liberté dans la rédaction. D’autre part je pouvais, parfois, interpréter, sous forme d’homophonies, les notes musicales (mi mi si la ré : mimi scie la raie, musique cruelle). Puis, pour aller encore plus vite, sous le nom d’emprunt de « Léon bègue » j’ai écrit comme un bègue parle, en doublant, triplant (et plus) les syllabes. C’est à la fin des années 90, finalement, que j’ai trouvé le dernier procédé, c’est-à-dire une simple mise en page : en plaçant les mots de couleurs et les notes musicales de part et d’autre (en haut et en bas) de l’équation de lettres. Je ne vois pas, aujourd’hui, comment je pourrais aller plus vite pour résoudre de telles anagrammes. Par contre, reste pour chaque texte, à trouver le ton pour exprimer ce que je veux dire, ce qui échappe, certes, à toute méthode. »
Jean Dupuy, 2006

 

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